À Vienne, Oskar Kokoschka (1886-1980) fait partie de l’avant- garde intellectuelle et artistique, qui regroupe Gustav Mahler (1860-1911), Sigmund Freud (1856-1939), Arnold Schönberg (1874-1951) ou encore Ludwig Wittgenstein (1889-1951). Ses portraits « psychanalytiques » d’alors peuvent d’ailleurs se rapprocher des théories de Freud sur l’inconscient.
Après la Première Guerre mondiale, l’artiste se consacre au paysage et effectue de longs périples à travers l’Europe et l’Asie.
Il passe en 1925 quelques jours à Bordeaux, durant lesquels il peint deux tableaux importants, l’un évoquant le Grand Théâtre, l’autre l’église Notre-Dame, bel exemple du baroque d'inspiration italienne en France, qui inspira à l’artiste cette œuvre riche de matière et de couleurs.
Kokoschka a conservé un souvenir de l'expressionnisme germanique dans sa palette aux tons stridents et heurtés, sa touche vibrante et expressive, son parti pris original de mise en page. Mais, contrairement à ses larges panoramas, traités en couches convulsives et circulaires, et obtenus d'un point de vue élevé, le peintre a ici choisi un espace clos avec une vision latérale et partielle de la façade, en légère contre-plongée, qui lui permet d’élargir l’espace, plutôt que d'adopter une vision frontale qui aurait écrasé les reliefs.
Le travail par touches rapides élimine les détails de l'ornementation foisonnante, au profit du rythme architectural de courbes et de contre-courbes, cernées de noir et soulignées par des zones d'ombre et de lumière, traitées par une combinaison de tons chauds et de tons froids.
La petite place est parcourue de personnages, silhouettes très rapidement ébauchées, et le trottoir rouge, comme un tapis de parade, ajoute encore au caractère ostentatoire de l’édifice.