Marquet (1875-1947) et Matisse se rencontrent à l’École des Beaux-Arts de Paris, où ils suivent tous deux l'enseignement de Gustave Moreau, qui leur transmettra, non seulement la pratique du dessin mais aussi le sens de la couleur expressive.
Si Marquet connaît une assez longue période de recherches avant de s’affirmer, Matisse, quant à lui, a déjà expérimenté la technique du néo-impressionnisme. Il entraîne son ami dans l’aventure, et lui communique ce goût pour une gamme violente de couleurs, fruit d'un travail sur les accords et les oppositions chromatiques, l’un des préceptes de ce mouvement. Fauve plus « modéré », Marquet s'en éloignera rapidement.
Les deux artistes préparent ensemble dès 1898 leurs « années fauves » dans des ateliers d’amis comme ici, dans l'atelier d'Henri Manguin, un de leurs condisciples chez Gustave Moreau, où les audaces colorées fusent en toute liberté. Initialement intitulé Nu dans l'atelier, ce tableau fut ainsi baptisé « Nu fauve » !
Matisse a d’ailleurs peint une version presque identique de ce Nu, sous un angle proche.
Les élèves, représentés en arrière-plan, sont à peine esquissés. Ils semblent concentrés sur la toile, en plein travail. On ressent l'ambiance d'un atelier, mais l'attention de l'artiste, des élèves et de nous tous se porte surtout sur la beauté éclatante de ce nu qui attire le regard.
Travaillé dans un modelé de tons chair, le modèle, dont le dos est magnifié par la lumière, se détache fortement de l’arrière-plan. Le mur vibre de couleurs intenses de vert, bleu et rouge posées par points ou tirets plus allongés ; on voit également de larges taches mauve à l'intérieur d'un cadre qui définissent le sujet d'un tableau de façon volontairement arbitraire.