Anne VALLAYER-COSTER, parcours d’une académicienne

Anne-Vallayer-Coster (1744–1818) est la première femme artiste à avoir été admise à l'Académie dans le genre de la nature morte dont elle se fit une spécialité. Elle est présente dans les collections du musée grâce à Nature morte, pastel acquis par le MusBA en 1983.

Anne Vallayer-Coster (1744–1818)
Nature morte
Pastel sur papier marouflé sur toile
Don René Domergue, 1983

 

Jeunesse et apprentissage
Anne Vallayer naît en 1744 dans un milieu d’artisans aisés proches de la Cour. À sa naissance, son père travaille comme orfèvre pour le roi, ce qui lui permet de disposer d’un logement à l’Hôtel des Gobelins, abritant alors une manufacture royale de meubles et de tapisseries.
La jeune femme évolue dans un milieu cultivé où les arts sont enseignés très tôt par des figures d’excellence dans leur domaine. Sa première professeure de dessin, Madeleine Basseporte (1701-1780), miniaturiste et dessinatrice au Jardin royal des Plantes, est chargée de retranscrire les végétaux royaux par le dessin ou l’aquarelle. Femme reconnue, marraine de la sœur de l’artiste, elle enseigne le dessin aux filles de Louis XV. Plus tard, Anne devient l’élève de Claude Joseph Vernet (1714-1789), célèbre paysagiste, membre de l’Académie royale de peinture et de sculpture, chargé par le roi Louis XV de peindre les grands ports français, dont celui de Bordeaux.
 
Succès et ascension sociale
Anne Vallayer est admise à l’Académie royale de peinture et de sculpture en 1770, à l’âge de 26 ans, au titre de peintre de natures mortes. Elle est alors une des rares femmes admises comme membre de cette prestigieuse institution. Cette distinction lui vaut d’exposer régulièrement au Salon, où elle connaît un véritable succès. Dès sa première exposition, elle est remarquée et saluée par la critique. L’écrivain et philosophe Diderot, célèbre pour ses Salons, écrit ainsi à son propos « Mademoiselle Vallayer nous étonne autant qu’elle nous enchante. C’est la nature rendue ici avec une force de vérité inconcevable, et en même temps une harmonie de couleur qui séduit. Tout y est bien vu, bien senti ; chaque objet a la touche de caractère qui lui est propre ; enfin nul de l’École française n’a atteint la force du coloris de Mlle Vallayer, ni son fini sans être tâtonné. » au Salon de 1771, dans Œuvres T.IV : Esthétique –Théâtre, Laurent Versini (ed.), Paris, Robert Laffont, coll. Bouquins, 1996.

En 1783, Anne Vallayer connaît une importante promotion sociale en épousant l’avocat au Parlement et receveur général, Jean-Pierre Sylvestre Coster (1745-1824). Grâce à leur relation de proximité avec la reine Marie-Antoinette (1755-1793), les jeunes mariés logent dans un grand appartement au Louvre. Anne Vallayer-Coster, proche de la reine, devient sa professeure de dessin.
 
Un attachement à la symbolique de la nature morte
Dotée d'une acuité et d'une finesse exceptionnelle, la jeune femme parvient à transmettre la beauté insoupçonnée des objets du quotidien. L'artiste renouvelle un genre longtemps considéré comme mineur en lui conférant une dimension symbolique qui s'était un peu perdue au profit d'une intention plus décorative. Simplement disposés sur une table avec un arrière-plan sombre et uniforme, les fruits, aliments, fleurs ou objets d’art deviennent de véritables objets de réflexion pour ses contemporains.
Anne Vallayer-Coster s’impose, à son époque, comme une artiste à part entière et comme l'une des artistes femmes majeures du XVIIIe siècle aux côtés des portraitistes Elisabeth Vigée-Lebrun (1755–1842) et Adélaide Labille-Guiard (1749-1803). Elle se fait l’héritière discrète de Jean-Siméon Chardin (1699-1779), reconnu et comme le maître de la nature morte à laquelle il donna ses lettres de noblesse.
La jeune femme exécute également des portraits, toutefois moins plébiscités par la critique.
 
Révolution et fin de carrière
Lorsque la Révolution française éclate en 1789,  Anne Vallayer-Coster, par ses liens avec la Monarchie, doit fuir la capitale. Elle se réfugie dans le village de Villemomble, au nord-est de Paris, et se voit ainsi contrainte d'interrompre ses apparitions au salon jusqu’en 1795.
Une fois la tourmente révolutionnaire passée, l’artiste expose de temps à autre au Salon et renoue avec le succès. Elle reste une artiste novatrice, talentueuse et incontestablement reconnue jusqu’à sa mort en 1818, à l’âge de 73 ans.

 

Anne Vallayer-Coster, Nature morte, MusBA © Mairie de Bordeaux, photo : F. Deval

Anne Vallayer-Coster, Nature morte, MusBA © Mairie de Bordeaux, photo : F.Deval